Permettre à tous les citadins d’accéder plus facilement aux fonctions essentielles d’une grande ville, telle est la vocation du concept de la ville du quart d’heure, imaginé par l’urbaniste franco-colombien Carlos Moreno, expérimenté depuis 2016 et qui a trouvé grâce aux yeux de la Mairie de Paris lors de la crise sanitaire. Une alternative crédible aux politiques traditionnelles d’aménagement des villes en fonction des infrastructures, souvent génératrices de ségrégation spatiale, et qui ne peut que contribuer à préserver les commerces de proximité des centres-villes si chers à nos concitoyens. A condition d’être accompagnée d’investissements significatifs dans les transports en commun et de tenir compte des spécificités des métropoles éligibles au déploiement de ce dispositif.

L’irrésistible ascension des ventes en ligne est, dans bien des esprits, une menace très sérieuse à la survie des petits commerces, tenus de s’adapter aux mutations des habitudes de consommation. Se réinventer, proposer une nouvelle offre (ré)conciliant le commerce physique et le e-commerce – qui tendent à être de plus en plus complémentaires – avec l’objectif de continuer à donner envie aux consommateurs de se déplacer. L’effort est conséquent et les commerçants ne peuvent l’assumer seuls. Ils doivent donc être épaulés par les pouvoirs publics via des mesures d’ordre structurelles à même de favoriser le tissu urbain et de stimuler les flux piétonniers dans les centres-villes.

La ville du quart d’heure est de nature à perpétuer l’attractivité des petits commerces, maintenus à proximité des habitations et des lieux tiers où les citadins passent la majorité de leur temps, dans un contexte de fort développement des mobilités douces et alors que de nombreuses enseignes comme Ikea, Leroy Merlin ou encore Normal investissent les centres-villes pour se rapprocher physiquement de leurs clients.

Ces deux phénomènes obéissent à une tendance lourde : les citadins d’aujourd’hui aspirent à la commodité, au confort, à une meilleure accessibilité des services et sont moins enclins à perdre une heure d’un temps jugé précieux pour aller faire leurs courses. Dès lors, il convient d’optimiser l’accessibilité aux magasins – et plus globalement à toutes les infrastructures qui contribuent à l’attractivité et au dynamisme des grandes métropoles -, à quelques minutes à pied ou à vélo de son domicile ou de son lieu de travail.

De nouvelles perspectives de développement pour les franchisés

Initié en Europe dans de grandes métropoles de part et d’autre de l’Atlantique (Paris, Milan, Dublin, Portland, Ottawa, Buenos Aires…), le concept de ville du quart d’heure est un vecteur de développement non négligeable pour les franchisés, avec une démultiplication des ouvertures pour les réseaux, de nouvelles opportunités d’ouvertures et un resserrement du lien avec les consommateurs. Il peut en découler, par extension, une offre mieux adaptée à leurs demandes avec, par exemple, des gammes de produits plus locales. Les contraintes logistiques liées à l’acheminement des produits et marchandises (logistique du dernier kilomètre) sont néanmoins susceptibles de dissuader certaines enseignes, tout comme le coût des locaux, plus élevé en hypercentre qu’en périphérie.

Mobiliser tous les acteurs concernés pour (re)dynamiser les centres-villes

Afin de lutter contre le délaissement de certains centres-villes, notamment ceux des villes de taille moyenne, il convient de raisonner au cas par cas, c’est-à-dire tenir compte de leurs spécificités, atouts et faiblesses, des attentes des habitants et de la façon dont s’organisent les flux piétons.

Pour ce faire, des investissements importants dans les transports en commun peuvent être nécessaires. Créer de nouvelles lignes de bus, métros et autres tramways, et/ou étendre des lignes existantes pour éviter un délaissement face auquel le développement des seules mobilités douces ne peut suffire. Abordables, les transports en commun demeurent, en effet, indispensables pour ceux, nombreux, qui en ont le plus besoin.

La prochaine réunion du Conseil national du commerce (CNC) portera notamment sur l’avenir du commerce en centre-ville. Une bonne occasion pour, peut-être, ouvrir le débat sur la création d’un nouvel organisme déployé dans chaque ville où le concept de ville du quart d’heure pourrait s’appliquer. Celui-ci ferait le lien entre l’ensemble des acteurs concernés, publics et privés – y compris, bien sûr, les commerçants -, la finalité étant de réfléchir de façon concertée aux actions ponctuelles ou durables à mettre en œuvre pour (re)dynamiser nos cœurs de ville. Là aussi au cas par cas.

La ville du quart d’heure, un concept essentiel pour préserver le commerce de proximité en centre-ville