Comment se portent, en 2024, les marchés du coworking et du bureau opéré ?

Il ne se sont jamais aussi bien portés qu’aujourd’hui. Nous sommes la niche florissante d’un marché immobilier en souffrance et l’on bénéficie d’une tendance de fond qui me conduit, à l’heure actuelle, à avoir davantage de demandes que d’offres. Pour le bureau opéré, Ubiq (plateforme de location de bureaux) avance le chiffre de +46 % de croissance entre 2022 et 2023 en nombre de mètres carrés.

Une fois ce cadre posé, pourriez-vous nous présenter le groupe InSitu ?

InSitu est une entreprise toulousaine née il y a 27 ans. Son fondateur et président, Pascal Fenasse, est aujourd’hui encore actionnaire majoritaire. Lors de sa création, l’objectif d’InSitu était de répondre aux besoins de relocations des collaborateurs nouvellement embauchés. L’unique client de l’entreprise était alors le groupe Action Logement, le collecteur du 1 % en France. L’an dernier, le ministre du Logement a décidé de couper les subventions à Action Logement, qui a, du même coup, rendu cette prestation payante. Les acteurs faisant de la relocation en France doivent dorénavant investir un champ concurrentiel classique (offre/demande), sans subventions. Nous faisons toujours ce métier, mais c’est devenu une petite partie de notre activité (5 % de notre chiffre d’affaires). Un chiffre d’affaires qui s’est élevé à environ 30 millions d’euros en 2023. Nous avons 80 collaborateurs et des implantations à Toulouse, Aix, Montpellier, Rennes, Paris et d’autres à venir…

Comment la réorientation de la stratégie de l’entreprise s’est-elle réalisée ?

Au fur et à mesure des années, nous avons conservé un client historique, le groupe Airbus, qui nous sollicitait traditionnellement sur de la relocation. Airbus a commencé à nous demander de lui trouver des bureaux de passage. C’est ainsi qu’est née notre activité de bureaux avec, il y a 20 ans, la création de notre premier immeuble de bureaux opérés « full » Airbus, alors mono-client. Nous sommes locataires de cet immeuble et proposons un contrat de prestation de services au groupe aéronautique. Aujourd’hui, nous disposons de 60 000 m2 de surfaces de bureaux opérés, dont 5 000 m2 de coworking. Nous sommes le numéro 2 du bureau opéré en France, derrière Deskeo. Attention, il ne faut pas confondre avec l’activité de coworking pure où WeWork, malgré ses déboires, reste le leader.

Quelles sont vos activités du moment ?

Nous avons signé un Befa (bail en l’état futur d’achèvement) pour un immeuble haussmannien du 16ème arrondissement, au 186, avenue Victor Hugo. La rénovation sera terminée en juillet 2026 ; la surface est de 5 000 m2. De plus, nous sommes en négociation avec le bailleur pour un second site à Paris, dans le 8ème arrondissement. Nous avons également le projet « Ecotone », à Sophia-Antipolis (06), développé par la Compagnie de Phalsbourg avec Jean Nouvel comme architecte ; c’est un ensemble de 34 000 m2 où nous allons prendre 7 000 m2 pour y installer du coworking et du bureau opéré. A Paris, nous souhaitons nous positionner sur un segment très haut de gamme pour créer des « work palaces », de l’hôtellerie de luxe de bureaux ; c’est une niche ultra premium avec une offre servicielle développée (espaces de restauration dirigés par un chef étoilé, services de conciergerie premium, SPA…) Nous ne voulons pas rester « middle market » dans la Capitale, nous visons uniquement le luxe.

Quelle distinction faites-vous entre le bureau opéré et le coworking ?

Pour le coworking, l’espace de travail est déjà pré-aménagé en postes de travail, pour lequel un prix de réservation mensuel est fixé. Les bureaux sont clés en main, utilisables immédiatement par les équipes. La contrepartie, c’est qu’il n’est pas possible pour l’entreprise occupante de personnaliser, de customiser les espaces. Le bureau opéré est, lui, totalement personnalisable et systématiquement personnalisé par InSitu en fonction du cahier des charges fourni par l’occupant. Nous faisons du sur-mesure. Nous vendons à un prix HT par mètre carré par an, comme pour un loyer. Tout ce qui concerne le « facility management » de l’immeuble est intégralement pris à notre charge. Pour résumer, le coworking représente 1 100 000 m2 sur le territoire national, tandis que pour le bureau opéré, nous sommes à environ 300 000 m2. Sur ce volume, InSitu en possède 60 000, soit plus d’1/6ème du marché.

Quelle est la fourchette de prix que vous proposez pour une prestation annuelle ?

La grande variable d’ajustement a trait au loyer. Selon la situation géographique de l’immeuble, les prix seront forcément différents. En régions, nous sommes sur un loyer qui tourne autour de 180/190 euros (HT) le mètre carré par an pour une fourchette basse. Si l’immeuble est mono-occupant, la valeur locative tournera plutôt autour de 450/480 euros (HT) le mètre carré par an. A Paris, avenue Victor Hugo, le simple loyer atteint les 1 000 euros le mètre carré ; en ajoutant la prestation de service proposée par InSitu, le loyer va frôler les 2 500 à 2 700 euros (HT) le mètre carré par an. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il n’y a qu’à Paris que nous proposons une gamme de luxe. L’emplacement est déterminant.

Quels objectifs vous êtes-vous fixés ?

Nous savons, d’ores et déjà, que nous allons réaliser 35 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024, car nos clients nous sont très fidèles. En 2027, pour nos 30 ans, nous visons les 50 millions d’euros, ce qui correspondra approximativement à 100 000 m2 de surfaces sous gestion. Il faut aussi savoir que l’entreprise Armonia, l’un des leaders mondiaux du « facility management » et de l’« hospitality » (1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires), est entré dans notre capital à hauteur de 20 % en janvier dernier. Armonia compte 35 000 salariés à travers le monde et est implanté en Europe, à Dubaï, en Afrique du Nord… L’idée est d’agglomérer les deux offres pour n’en faire qu’une. Ce partenariat va accélérer notre développement.

Stéphane Adnet (InSitu Groupe) : "avec le bureau opéré, nous proposons du sur-mesure à nos clients !"