Quelles informations doit-on principalement retenir de la publication des résultats semestriels d’INEA ?

Il faut, d’abord, relever la croissance soutenue de notre chiffre d’affaires (+17 %) entre le premier semestre 2023 et celui de 2024. Sur la thématique du « green building », qui nous tient particulièrement à cœur, nous avons poursuivi notre stratégie de sobriété énergétique puisque nous avons conformé la quasi-totalité (90 %) de notre patrimoine de bureaux aux exigences du décret tertiaire, alors même que l’obligation de respecter ces seuils n’est fixée qu’à horizon 2030. De plus, pour maximiser notre neutralité carbone, nous avons lancé une action qui consiste à produire une énergie renouvelable de type solaire ; pour ce faire, nous avons passé un partenariat avec une entreprise du nom de SerenySun. En économie circulaire, nous nous sommes penchés sur le traitement des déchets. Notre croissance opérationnelle reste soutenue, de même que la résilience de notre portefeuille, avec une correction des valeurs de ce dernier de l’ordre de -1,3 % au cours de ce semestre. Depuis fin 2022, c’est la première correction que nous avons à déplorer, ce qui prouve la résistance de notre portefeuille malgré la crise que nous avons subie et le relèvement des taux d’intérêt qui en a découlé (+ 400 points de base en quelques mois). Pour notre croissance de 17 %, elle se répartit assez bien entre le périmètre constant et les nouveaux immeubles que nous avons intégrés (presque 50/50). A périmètre constant, l’impact de l’indexation des loyers s’est fait ressentir. Cette indexation s’est logiquement répercutée sur les loyers perçus, le solde étant une amélioration globale desdits loyers. Le taux de vacance reste, quant à lui, stable, passant de 10,7 à 10,9 % en un an. Notre excédent brut d’exploitation connaît, de son côté, une hausse de 20 %, ce qui met en lumière la bonne maîtrise de nos frais de fonctionnement. Tous les immeubles que nous acquérons le sont grâce à notre dette et nos lignes de financement. Notre résultat net récurrent (RNR), par action comme en valeur absolue, augmente de 6 %. Nous espérons que le pipeline d’opérations que l’on possède, d’un montant d’environ 100 millions d’euros restant à décaisser, continuera d’accompagner la croissance opérationnelle de la société jusqu’à 2025-2026.

Votre patrimoine a-t-il démontré sa résilience malgré le contexte pour le moins compliqué ?

La valeur totale de notre portefeuille, droits compris, s’élève à 1 252 000 000 euros, avec un taux de capitalisation de 6,26 % à fin juin. Depuis fin 2022, ce taux a augmenté de 48 points de base. Rappelons que notre « business model » repose sur le fait d’acquérir des immeubles de bureaux neufs à commercialiser. Notre endettement est maîtrisé, « vert » à 81 %, et notre dette est couverte par rapport à la hausse des taux d’intérêt à 94 %. De plus, notre rentabilité locative est supérieure à 7 %. Au cours de ce semestre, nous avons donc combiné croissance opérationnelle et résilience patrimoniale ; cette stratégie est saine et performante. La seule déception que l’on peut déplorer est la décote boursière que nous avons connue ; cette décote, de l’ordre de 40 %, nous paraît excessive car si l’on retient simplement la valeur de notre patrimoine neuf et « vert » ramené au mètre carré, ce dernier est valorisé à 2 600 euros. En date d’aujourd’hui, nous pensons associer à une politique d’investissements une politique de rotation opportuniste d’actifs.

Que pouvez-vous dire sur le bureau en régions ?

L’immobilier d’entreprise au sens large (bureaux, logistique, commerces…) détient un volume d’investissements plus important en régions (53 %) qu’en Ile-de-France (47 %). A Paris intra-muros, le marché de l’immobilier d’entreprise fonctionne bien, avec une faible vacance et des loyers qui se revalorisent ; de plus, ce marché a connu une correction de valeurs fin 2023 et est encore très peu « vert », ce qui laisse une grosse marge de progression en termes de Capex (dépenses d’investissements de capital). Le marché francilien des bureaux est en souffrance, avec une base peu saine car beaucoup d’actifs, environ 40 %, sont obsolètes. Les immeubles désuets qui ont été quittés par leurs occupants ne valent aujourd’hui plus grand-chose et présentent de réelles difficultés. Enfin, le marché des bureaux en régions nous semble sain ; bien qu’il ne se soit jamais envolé, il a toujours bien résisté, avec une profondeur locative conséquente et une demande placée qui l’est tout autant. Le marché de régions n’a pas été impacté de la même manière par le Covid, avec beaucoup moins de télétravail qu’en région parisienne. De plus, la taille des immeubles est plus réduite et correspond bien aux volumes d’investissements recherchés. C’est un marché plus granulaire et plus liquide, qui a mieux résisté à la crise.

Enfin, quel est votre avis sur le contexte politique actuel ? Cela peut-il avoir un impact sur votre activité immobilière ?

L’incertitude politique peut naturellement entraîné un certain attentisme de la part des locataires ou des divers décideurs pouvant impacter le secteur immobilier. Nous pouvons, néanmoins, espérer l’avènement d’une conjoncture économique qui s’améliore, accompagnée d’un abaissement des taux d’intérêt. Concernant la scène politique française, la formation d’un futur gouvernement aura le mérite de fixer, à minima, un programme, d’établir une feuille de route. Il faut donc souhaiter qu’il soit constitué le plus rapidement possible…

Philippe Rosio (INEA) : "90 % de notre patrimoine répond aux exigences du décret tertiaire"