Aussitôt l’entretien lancé, Jean-François Houdeau insiste sur un point : il ne faut surtout pas confondre Groupama Gan REIM avec Groupama Immobilier, Gan Assurances ou d’autres entités. Ce serait se rendre coupable d’une terrible méprise. D’ailleurs, Groupama Gan REIM s’apprête à fêter ses dix ans à la fin du mois, témoignage d’une longévité pour cette SGP (Société de gestion de portefeuille) « strictement indépendante ». « Nous gérons de l’épargne public et avons reçu un agrément de la part de l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) ; nous avons donc une responsabilité importante vis-à-vis de celles et ceux qui nous ont confié leur argent en toute confiance » tient à préciser Jean-François Houdeau. Avec ces dix bougies, Groupama Gan REIM, l’incarnation de la pierre-papier de Groupama, a acquis une profondeur d’expérience conséquente. Suffisamment, en tout cas, pour lancer une seconde SCPI, Attraits Pierre, qui a reçu son agrément le 26 avril dernier. Le 26 juin, la commercialisation de la SCPI a été lancée au sein des réseaux de l’entité, Caisse régionale Groupama et Gan Patrimoine.

Vous avez officiellement lancé la collecte le 26 juin dernier pour votre dernière SCPI, Attraits Pierre. Que pouvez-vous nous dire à son sujet ?

C’est une SCPI de même nature qu’Affinités Pierre (créée en 2016), c’est-à-dire à capital fixe. Ce qui nous permet d’en maîtriser la collecte et de ne pas augmenter inconséquemment le capital lorsque le marché ne s’y prête pas. Les SCPI à capital variable sont une usine à commissions pour les sociétés de gestion, mais pas la solution la plus sécurisante pour les épargnants. Nous ne clamons pas des objectifs de collecte se chiffrant en milliards d’euros comme certains s’en gaussent. Au risque de finir au tapis et d’y entraîner les épargnants dans leur sillage… Attraits Pierre vise une diversification totale, à l’inverse d’Affinités Pierre qui s’était concentrée sur le triptyque classique de l’immobilier tertiaire : bureaux, commerces, logistique. Attraits Pierre ajoute au tertiaire des catégories d’actifs telles que le résidentiel, les « data centers », les loisirs, les résidences gérées… Le spectre a été élargi au maximum afin de faire de cette nouvelle SCPI un outil de diversification qui vienne en complément de la gamme proposée par Affinités Pierre. Enfin, Attraits Pierre est labellisé ISR depuis son baptême, contrairement à sa grande sœur.

La SCPI Attraits Pierre a-t-elle vocation à investir dans des actifs situés à l’étranger ?

Pour Affinités Pierre, l’étranger représente environ 25 % du montant des actifs détenus. Pour Attraits Pierre, nous souhaiterions nous exporter dès les prochains mois… Ce qui ne devrait pas être difficile, puisque nous disposons, aujourd’hui, de 25 collaborateurs, ce qui n’était pas le cas en 2016 lorsque nous avons lancé notre première SCPI.

Le contexte est-il favorable au lancement d’une nouvelle SCPI ?

La situation a radicalement changé entre 2016 et aujourd’hui, que ce soit concernant l’évolution des taux d’intérêt, les valorisations, les difficultés rencontrées… Pour Affinités Pierre, l’argent de nos épargnants a été préservé par notre philosophie, notre stratégie prudente. Nous voulions être à la hauteur des promesses que nous avions formulées au début de notre histoire. Nous y sommes parvenus, démontrant ainsi la pertinence et la résilience de notre modèle. L’idée est de poursuivre cette stratégie avec Attraits Pierre, avec des valeurs qui ont corrigé et un certain nombre d’actifs qui peuvent être acquis dans des conditions bien plus favorables dès lors que l’on a des fonds à investir. Nous n’avons pas pour ambition d’endetter fortement notre nouvelle SCPI.

Vous insistez sur les mauvaises pratiques de certains acteurs, qui « joueraient » avec l’argent de leurs épargnants quitte à leur en faire perdre. Pourriez-vous préciser ce point ?

Quand on lance une SCPI, nous considérons qu’il y a des règles primordiales à respecter : être de bons conseils vis-à-vis de clients qui nous accordent leur confiance, être franc, honnête et transparent avec les épargnants. Ensuite, faire uniquement ce que l’on comprend et maîtrise, ne pas s’improviser maîtres sur des segments pour lesquels notre expertise est limitée. Il faut être, au contraire, dans une logique de co-investissement pour les secteurs que l’on maîtrise moins, avec des sachants et des experts à nos côtés. Il faut de la modestie et du bon sens dans ce métier. L’immobilier est trop tangible, trop réel, trop impactant sur la vie des gens pour se permettre de faire n’importe quoi. Des acteurs ont perdu ce bon sens, ou alors ont procédé à une forme d’escroquerie organisée, ce qui n’est guère plus reluisant. Il y a des endroits où l’on a construit n’importe quoi, n’importe comment, avec des bureaux qui resteront vides pendant des années tant rien n’a été pensé pour rendre les sites attractifs. Sur ces manquements, la responsabilité est collective : politiques, promoteurs et investisseurs ont été en tort et devront répondre de leur dilettantisme. Même si, pour le moment, l’AMF ne s’émeut pas. Nous sommes l’une des seules sociétés de gestion dont les collaborateurs investissent dans les fonds qu’ils créent et qu’ils gèrent. Nous croyons en ce nous faisons ! Nos intérêts sont alignés avec ceux de nos souscripteurs et notre démarche est rationnelle, prudente, mais empreinte d’une logique opportuniste, dans le bon sens du terme. Une SCPI est dans une démarche de détention longue, c’est sur la distance que l’on constate la capacité d’une société de gestion à créer de la valeur ou à en détruire.

Au-delà du lancement de cette nouvelle SCPI, qui constitue l’annonce centrale de cette rentrée, que pourriez-vous dire de plus concernant les projets à court ou moyen termes que vous projetez de lancer ?

Nous voulons être une référence du marché concernant notre rendement et notre capacité de création de valeur. Quand on fait correctement son métier, un soubresaut du marché ne doit pas nous atteindre. Nous ne devons pas baisser en même temps que les autres, mais faire preuve, à l’inverse, de résilience même dans les moments de tempête. Notre volonté constante est de faire mieux que les autres. Nous tirons notre satisfaction du fait que des clients continuent d’investir chez nous. De plus, nous sommes aujourd’hui immunisés vis-à-vis des fluctuations du marché. « Small is beautful » : tel est notre credo ; il ne faut pas avoir les yeux plus gros que le ventre, promettre monts et merveilles en procédant à des collectes d’argent anarchiques. La mesure est une vertu qui se perd et que nous tentons de réhabiliter. De même que le temps long, puisque la durée de maturité d’un placement dans une SCPI est de huit ans. Nous ne sommes pas là pour faire des coups, avec de grosses rentrées d’argent immédiates. Nous ne jouons pas au poker, l’investissement dans une SCPI est un projet, avec une maturité lente et un retour sur investissement qui demande, logiquement, du temps. Nous faisons aujourd’hui partie des plus importants collecteurs, ce qui prouve la pertinence de notre stratégie. Pour les dix prochaines années, nous voulons poursuivre notre exigence de zéro défaut et de rendez-vous fixes avec nos clients. Nous souhaitons aussi continuer à créer des véhicules dès lors qu’ils ont un sens par rapport au cycle du marché tel qu’il est. Et enfin, continuer de prendre du plaisir, avec une dimension humaine prépondérante. Nous voulons être un pôle d’attirance plutôt que de défiance.

Jean-François Houdeau (Groupama Gan REIM) : "nos intérêts sont alignés avec ceux de nos souscripteurs !"