Quel regard sur le marché ?

Les volumes globaux investis en immobilier d’entreprise au 1er semestre devraient rester faibles, voire inférieurs à ceux de 2023. Cependant, nous pensons que le marché a atteint un point bas. En effet, si ce marché s’avère difficile pour l’ensemble des acteurs, nous enregistrons, en revanche, quelques signes de frémissement. Ainsi, un peu plus de visibilité au niveau macro-économique permet aux investisseurs d’arriver de nouveau à étudier des « business plans » de manière plus raisonnée. Par ailleurs, à la différence de la crise financière des années 2007/2008, il y a encore de l’« equity » disponible. Et si les financements sont plus délicats à mettre en place, on arrive néanmoins à en trouver et ce, à des conditions toujours assez raisonnables…

C’est plutôt la rareté des stratégies « core » qui grippe le marché. Avec un double effet : les immeubles « core » rencontrent aujourd’hui des difficultés à trouver preneurs à leur prix réel, c’est-à-dire celui du « core ». Par ailleurs, des liquidités sont disponibles pour se placer dans les actifs « value add », mais les investisseurs ne pouvant pas clairement anticiper l’évolution des actifs « core », ils demeurent très prudents quant aux prix d’entrée du « value add ». Ce qui explique, en grande partie, la faiblesse des volumes investis. C’est ainsi qu’à l’antienne relative à l’« emplacement » chère à l’immobilier, il semble qu’actuellement s’en est une autre basée sur le « timing » qui prime… Mais dans un tel marché, les opportunités existent et il y aura des gagnants…

L’ensemble « Opéra Gramont » (2ème)…

Les bureaux sont les premiers touchés…

Effectivement, la baisse des volumes investis résulte notamment du nombre limité de grandes transactions de bureaux. Mais, là encore, si ce ne sont plus les mêmes mètres carrés de bureaux qui sont utilisés par les entreprises (puisqu’ils doivent être notablement plus efficaces), celles-ci ont toujours besoin de bureaux. Et les mètres carrés délaissés restent potentiellement disponibles pour des opérations de restructuration ou de recyclage… A l’exemple des deux opérations de transformation de bureaux en logements que nous avons bouclées l’an dernier, à Puteaux (92) et Vélizy (78)…

… les centres commerciaux « Passy Plaza » (16ème)…

Qu’en est-il des autres créneaux du marché ?

Certains demeurent performants, notamment la logistique. Dans ce secteur, nous avons assisté à un réel réajustement des prix entre mi-2022 et fin 2023/début 2024. Et nous enregistrons dès maintenant une nouvelle compression des taux dans l’immobilier logistique où la forte demande des investisseurs fait face à une offre de qualité relativement limitée.

Le commerce, de son côté, s’en sort très bien après la difficile période Covid.

Quant aux actifs de diversification, de nombreux investisseurs veulent y être exposés, ce qui explique également la moindre disponibilité des fonds pour les autres segments du marché. Mais les actifs de diversification, qu’il s’agisse de résidences étudiants, de coliving ou de data centers, constituent des marchés qui ne sont pas encore matures et, donc, à la profondeur toujours limitée…

Quels résultats pour le département investissement de Knight Franck dans ce marché ?

Alors que le volume total investi a été divisé par plus de deux, nous avons réussi à maintenir notre chiffre d’affaires l’an passé en réalisant deux fois moins de transactions. Il est vrai que dans un marché où les grandes transactions, celles de plus de 100 millions d’euros, se sont raréfiées, nous en avons bouclé cinq et ce, en tant que conseil des vendeurs : « Passy Plaza », « O’Parinor », le 1-3, rue du Chevalier de Saint-George (1er), « Opéra Gramont » ou encore un data center de 100 mégawatts (puissance qui le place dans le « top 5 » des data centers en Ile-de-France) dans le sud francilien. Bien sûr, le hasard n’a rien à voir avec ce résultat : nous avions travaillé parfois depuis plusieurs années sur certains de ces dossiers. Et ce, sans compter nos autres transactions…

et O’Parinor, à Aulnay-sous-Bois (93) : trois exemples de grandes transactions à l’investissement bouclées par Knight Franck l’an passé.

Aujourd’hui, quelle stratégie de développement ?

Nous nous concentrons sur ce que nous savons faire : les bureaux à Paris et en Ile-de-France, le commerce dans l’Hexagone en nous appuyant sur notre forte position, la logistique et les actifs de diversification que constituent le résidentiel au sens large et les data centers. Nous avons acquis une position forte s’agissant de ces derniers, en nous appuyant également sur l’expertise de notre équipe EMEA. Il s’agit d’un marché d’opérateurs qui cherchent à prendre des positions en se développant rapidement. Donc, plus les centres sont puissants, mieux c’est. Nous avons ainsi plusieurs opérations de centres de données de taille significative sous mandats de vente…

A ce propos, quels exemples de nouveaux mandats ?

Parmi nos mandats figure un portefeuille logistique de trois actifs d’une valeur de plus de 130 millions d’euros. Nous sommes également mandatés pour un « retail park » dans le nord de la France d’une valeur de 110 millions d’euros ou encore, donc, de plusieurs développements de data centers en Ile-de-France. Sans compter plusieurs dossiers de bureaux dans Paris entre 10 et 30 millions d’euros. Autre exemple, nous préparons, pour la fin de l’année, un gros sujet parisien, un actif mixte bureaux/commerce…

Quelle équipe ?

Le département comprend quinze professionnels. Une équipe dont nous estimons la taille adaptée au marché actuel. Elle nous permet de réagir facilement et avec une certaine souplesse, tout en pouvant répondre aux besoins de nos clients. Néanmoins, si nous souhaitons conserver notre agilité, nous ne nous interdisons pas de poursuivre notre développement par opportunité. Sachant que l’équipe a été constituée essentiellement par affinités. Nous ne nous interdisons rien. C’est ainsi que nous pourrions envisager des développements en matière de « debt advisory » ou encore de transformation d’usage à condition non seulement que cela ait du sens du point de vue « business », mais également que nous fassions les bonnes rencontres…
En soulignant qu’au niveau européen, Knight Frank a pour ambition de multiplier par deux au cours des cinq prochaines années le chiffre d’affaires réalisé en Europe continentale…

A écouter également : le iPodcast d’Antoine Grignon

Antoine Grignon (Knight Frank France) : « des signes de frémissement »…