Sacré chemin qu’a mené, en effet, notre « Pierre d’Or » qui raconte avec humour et gourmandise – et un punch qui en dit long – quelques étapes de sa vie. Au commencement, parlons famille et ce nom qui rappelle les origines slaves : le père de la future « cheffe » qui, explique-t-elle « était plein d’ambition pour ses filles, a toujours été très attaché au travail et [qui] pense que l’on doit faire des efforts pour le pays qui vous accueille ». Leçon parfaitement retenue par la jeune Nathalie qui, comme sa sœur, suit avec sérieux son cursus scolaire. La voici à l’ESC Dijon (un choix dicté par le cœur)… elle y sera dans la même promotion qu’un certain Jean-Marie Tritant [aujourd’hui patron d’URW, ndlr] : « j’y ai beaucoup appris et la formation technique qui m’y a été donnée me sert encore aujourd’hui ». Classiquement, elle pratique l’audit à la sortie de l’école : « j’ai adoré – un mot qu’elle utilise souvent – et j’ai tout de suite compris que j’étais faite pour ça ; je voulais absolument qu’on me reconnaisse comme une experte ». Cette bosseuse reconnue se donne à fond jusqu’à ce qu’un de ses clients, la Banque française commerciale de l’Océan Indien la recrute comme directrice des affaires financières. « Très jeune, j’ai pu ainsi franchir le fameux barrage imposé à beaucoup de femmes : entrer dans le comex… j’ai aimé être manager, travailler avec des équipes, mettre en place des chantiers ». Les contraintes des fréquents aller-retours entre La Réunion et Paris (sans oublier quelques passages par l’Ile Maurice car The Mauritius Commercial Bank est actionnaire de la maison) poussent, cependant, la jeune mère de famille à retrouver Paris. En 2000, le trio Yves Defline, Alec Emott et Olivier Wigniolle lui propose de rejoindre la Société Foncière Lyonnaise (SFL) : il s’agit de ses vrais « débuts » dans l’immobilier. « Une formidable école » dit-elle « car j’y ai pris le goût de l’immobilier, la relation avec les investisseurs, la communication financière… ». Et, non sans fierté, elle participe au groupe de travail qui propose la mise en place du statut Siic, qui a changé la donne financière et fiscale des foncières… Mais ce qui l’a peut-être le plus marqué dans ces années SFL, c’est le lien avec Jacques Calvet qui l’encourage vivement.

Après une tentative, qui échoue, d’introduire en Bourse l’immobilier d’AXA (un défi qui lui avait été proposé par Pierre Vaquier et Alain Dinin), elle est appelée par Serge Grzybowski, qui vient d’être nommé à la tête d’Icade. Toujours enthousiaste, Nathalie Palladitcheff raconte « la profonde réorganisation » qu’il a fallu mettre en place. Et puis, en 2015, une rencontre avec Daniel Fournier, le patron de la filiale immobilière de la Caisse des Dépôts et Placements du Québec va profondément modifier sa vie et sa trajectoire professionnelle. Partir au Canada, pour son mari et ses trois fils, c’est aussi une aventure familiale. Après un long week- end en mars (« il faisait un froid terrible »), la décision est prise : traversons l’Atlantique ! Et notre bosseuse fera merveille chez Ivanhoé Cambridge. D’abord vice-présidente et cheffe de la direction financière, elle est nommée présidente trois ans plus tard. Investissement dans 19 pays, rééquilibrage du patrimoine (moins de centres commerciaux, plus de logistique par exemple), politique RS et on en passe (beaucoup !), notre « Pierre d’Or », comme sa famille, s’acclimate parfaitement au temps québécois : elle est même aujourd’hui citoyenne canadienne. « Je suis reconnaissante et admirative aux dirigeants et actionnaires d’avoir fait confiance à une femme, étrangère, pour diriger cette magnifique maison et j’en suis fière ».

Cette ambitieuse, enthousiaste (« je n’aime pas la nostalgie ni les regrets » commente-t-elle), aime à citer, en riant, la philosophie à la Spiderman : «avec les grands pouvoirs viennent les grandes responsabilités». Mais elle ne dédaigne pas les lectures plus « sérieuses ». Elle vient ainsi de terminer « Tsunami » de Marc Dugain, dont elle dit le plus grand bien. Dehors, à Toronto, il fait très beau et notre « Pierre d’Or », fine silhouette et sourire aux lèvres, redit son attachement à la danse classique. Elle fait toujours des pointes. Cela vous étonne ?

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Nathalie Palladitcheff (Ivanhoé Cambridge) : en pointe