A quelques mois de la livraison des ouvrages, le compte à rebours est lancé pour les Jeux Olympiques de Paris 2024. Le chantier du Village des Athlètes a démarré à Saint-Denis, Saint-Ouen-sur-Seine et L’Ile-Saint-Denis. Au-delà de son ambition de fournir un accueil optimal aux délégations sportives et à leurs équipes, le Village des Athlètes a fait l’objet d’un travail très poussé sur l’éco- conception. Alors que Paris était en compétition face aux autres capitales mondiales, les ambitions de développement durable ont toujours été centrales pour les parties prenantes du projet : CDC Habitat, Eiffage, Groupama Immobilier, Nexity, Vinci Immobilier et Icade, le tout sous le patronage de l’établissement chargé des infrastructures olympiques et paralympiques, la Solideo (Société de Livraison des Ouvrages Olympiques). Le « village » éco-conçu sera mis à disposition des JO de Paris 2024 à partir du 1er mars prochain.

Une quasi-autonomie énergétique

Les ouvrages olympiques intègrent de nombreux dispositifs pour relever le défi énergétique qui est posé au secteur de la construction et de l’aménagement. De fait, le quartier sera autonome en énergie à 80 % grâce à une production locale d’énergies renouvelables. Le projet bénéficie d’une première mondiale développée par le groupe EDF : un système de stockage d’énergie par batteries zinc-air non polluantes et recyclables à 100 %. « Une réflexion a été engagée sur la performance énergétique des ouvrages pour diminuer les consommations d’énergie, depuis l’enveloppe thermique des bâtiments jusqu’à leur aspect architectural » souligne le constructeur Eiffage.

De plus, pour subvenir aux besoins énergétiques, les ressources locales et décarbonées ont été privilégiées : des panneaux photovoltaïques et solaires permettant de réduire le bilan carbone des ouvrages, le recours à la géothermie ou encore la récupération d’énergie existante ont été massivement mis en place. Au-delà de la réduction du bilan carbone, les usages et besoins des ouvrages ont été anticipés au maximum pour coupler cet objectif au confort des futurs occupants.

« L’ambition était de se projeter sur ce que la France était capable de faire en termes de démonstrateur de la ville durable à l’horizon 2030, voire 2050 » assure Anne-Sophie Grave, présidente du directoire de CDC Habitat. Alimenté à 68 % par une énergie renouvelable issue de la géothermie, le réseau « chaud-froid » du Village des Athlètes répond à cet impératif pour éviter au maximum de recourir à la climatisation. Selon Eiffage, « un véritable confort thermique » sera apporté par une régulation des températures tout au long de l’année, autant l’hiver que l’été. Au-dessus de 32°C, la température intérieure sera diminuée de 6°C ; en revanche, en-dessous de 32°C, la température intérieure sera comprise entre 19°C et 26°C. « L’orientation des bâtiments et un jeu sur les hauteurs pour optimiser l’éclairage naturel, mais aussi l’ensoleillement, ont été pensés pour garantir les meilleures températures » explique Anne-Sophie Grave.

« Le quartier sera autonome en énergie à 80 % grâce à une production locale d’énergies renouvelables »

Faire revenir la biodiversité

La protection et le renforcement de la biodiversité constituent deux piliers de la stratégie d’excellence environnementale de la Solideo, qui s’applique à l’ensemble des maîtres d’ouvrage. Le projet laisse une grande place à la végétalisation et à la désartificialisation des sols, ainsi qu’à la biodiversité augmentée, afin de lutter activement contre les îlots de chaleur urbains lors des pics de température. Les ouvrages olympiques doivent permettre à la biodiversité dans son ensemble de regagner des espaces, démontrant ainsi que la ville et ses usages sont compatibles avec celle-ci. La plantation d’une forêt urbaine de 3 000 m2, ce qui représente 1 500 arbres, contribuera à lutter contre les îlots de chaleur et permettra à de nombreuses espèces animales et végétales de s’y implanter. L’objectif de la Solideo est de réconcilier le milieu urbain et la biodiversité en s’appuyant sur deux idées directrices : maintenir et amplifier les écosystèmes existants lorsque la biodiversité est déjà développée sur site, et restaurer ou accompagner la création d’écosystèmes sur des territoires où le degré de biodiversité est faible. Pour y parvenir, chaque projet est appréhendé dans sa totalité, à travers un diagnostic écologique qui tient compte de l’ensemble des espaces, du sol au bâti, faisant ainsi de la ville un véritable support de biodiversité. « Il y a un engagement fort sur l’importance du réemploi et de l’économie circulaire. Cela concerne toute la gestion du chantier, notamment par l’approvisionnement via la Seine, qui a permis d’alimenter le chantier pour certains matériaux » explique Anne- Sophie Grave.

100 % de bois français

L’intégralité des bâtiments intègrent du bois dans leur construction, que ce soit pour les sols, qui représentent 330 000 m2 de surface, que pour les structures. En plus de sa solidité permettant une résistance au temps, le bois stocke le carbone. A l’occasion des Jeux Olympiques, le projet France Bois 2024 a été mis en place dès 2018 pour favoriser l’utilisation des solutions de construction et d’aménagement en bois français. L’objectif est de garantir un approvisionnement en bois d’origine française. « La garantie, c’est que le bois provienne de forêts qui sont gérées durablement et donc certifiées » précise Anne-Sophie Grave. Pour assurer leur approvisionnement, les deux grands propriétaires forestiers français que sont CDC Habitat et Groupama Immobilier, via la Société Forestière Groupama, ont mobilisé leurs ressources. La conception bioclimatique des bâtiments intègre une double orientation, jeu de hauteur entre les bâtiments pour maximiser l’ensoleillement et balcons en bois faisant office de pare-soleil.

Ce projet emblématique devait satisfaire un cahier des charges extrêmement exigeant en termes de frugalité des bâtiments et de confort des futurs usagers. L’ensemble du secteur E, « Les Belvédères », est construit avec pour objectif de limiter les émissions de CO2 à 700 kg par m2 de surface de plancher. De nombreuses actions ont été réalisées pour répondre aux attentes du maître d’ouvrage et ce, dès la conception en optant pour des modes constructifs les plus vertueux possibles. La conception laisse également anticiper les évolutions climatiques. L’accent a été mis sur le réemploi de matériaux issus de surplus de chantier ou de déconstructions. En effet, plus de 10 % des matériaux utilisés proviennent d’anciennes constructions (à l’instar des cloisons, faux-planchers, chemins de câbles…). Cette démarche permet de réduire d’au moins 5 % le bilan carbone construction. Mais le réemploi ne se limite pas à la phase de construction. Près de 75 % des matériaux mis en œuvre pour la phase « Jeux » seront démontés et réemployés lors de la phase « héritage ». Ce qui permet de viser de nombreuses certifications, à l’instar de BBCA niveau Standard, E+C- niveau E3C2, NF Habitat HQE niveau « Excellent » et « Très Performant », certification BREEAM et Biodiversity construction.

La phase « héritage »

Les bâtiments ont été conçus de façon réversible afin de proposer une deuxième phase nommée « héritage » qui laissera place à des quartiers pensés pour les habitants, les commerces et les bureaux. Les logements des athlètes seront transformés en plus de 2 200 appartements familiaux et 800 pour étudiants ou personnes âgées. 120 000 m2 seront reconvertis en locaux d’activités, bureaux et commerces. « Pour nous, ce qui est important, c’est la qualité qu’offrira ce village aux futurs locataires » affirme Anne-Sophie Grave. Des cloisons issues du recyclage ont été installées pour les Jeux, qui seront retirées pour adapter la taille des appartements. Un point d’honneur a été apporté à l’accessibilité universelle puisque les logements vont aussi servir pour les Jeux Paralympiques. Ainsi, des rampes et des ascenseurs ont d’ores et déjà été installés. « 100 % des logements familiaux seront accessibles et les espaces publics ont été pensés sous le prisme de la conception universelle » indique Nicolas Ferrand, directeur général exécutif de la Solideo. Concrètement, tous les appartements sont conçus pour être confortables au quotidien pour l’ensemble des occupants. Par exemple, toutes les « ruptures de niveaux » (dormants) sont supprimées : que ce soit pour accéder à la douche ou au balcon. Pour concilier ses ambitions en matière d’accessibilité, la Solideo a notamment soutenu, à travers son fonds d’innovation, un projet de développement de douches sans bordures au sol dans des bâtiments à plancher en bois, permettant de limiter l’impact carbone. Pour accompagner la mise en œuvre de cette stratégie, elle a constitué un groupe de travail « accessibilité universelle », composé de huit associations représentatives de toutes les situations de handicap. On peut également citer la hauteur des prises, qui a été imaginée pour pouvoir être à portée de tous, ou encore la largeur des portes et couloirs tant dans les parties communes que dans les appartements, les aménagements dans la salle de bain, la hauteur des porte-manteaux ou des radiateurs, les meubles sous vasque amovible, barres de douche, robinets facilement préhen- sibles… Enfin, une signalétique inclusive multi- sensorielle sera déployée dans le Village lors des épreuves pour pouvoir se déplacer et se situer en sécurité dans l’espace public. Les travaux de conversion des appartements débuteront en novembre 2024 avec la signature des premières Vefa pour les logements. Ensuite, entre juin 2025 et avril 2026, les logements seront livrés aux acquéreurs et investisseurs.

Le Plateau et l’Aire des Vents

A côté du Village des Athlètes, perçu comme LA prouesse architecturale et immobilière des futurs Jeux Olympiques 2024, figure un autre chantier tout aussi ambitieux : le Village des Médias. C’est là que, du mois d’avril pour les premiers repérages et installations, jusqu’à la mi-septembre, qui coïncidera avec la fin des Jeux, les journalistes du monde entier venus couvrir l’événement prendront leurs quartiers. Combien au juste ? Environ 1 500, entre journalistes et membres des équipes techniques. Dit autrement, le projet, particulièrement attractif, ne manquait pas de prétendants dès ses balbutiements.

« Les bâtiments ont été conçus de façon réversible afin de proposer une deuxième phase nommée « héritage » qui laissera place à des quartiers pensés pour les habitants, les commerces et les bureaux » Petit retour en arrière : au printemps 2020, la France est en pleine période Covid. L’économie est à l’arrêt, les Français cloîtrés chez eux. Bien qu’incertain, l’horizon français s’égaie néanmoins d’une lointaine perspective de communion et fierté nationales : l’organisation des futurs Jeux Olympiques de l’été 2024. Pour plusieurs promoteurs, l’occasion est trop belle pour la laisser filer. Sogeprom, la filiale immobilière de la Société Générale, est sur les rangs, associée à l’entreprise française de construction Demathieu Bard. « Nous avons enchaîné les visioconférences pour ficeler notre projet et la consultation de désignation des lauréats s’est également faite en distanciel » se souvient Philippe Jung, directeur général immobilier de Demathieu Bard. La consultation en question portait alors sur deux sites : le Plateau et l’Aire des Vents, tous deux situés à Dugny, une commune de Seine-Saint-Denis faisant partie de l’Etablissement public territorial Paris Terres d’Envol. La localisation est idéale, à une distance accessible à pied de l’International Broadcast Center, le Centre international de diffusion qui constitue la plaque tournante temporaire pour les diffuseurs lors des grands événements sportifs.

Le duo Sogeprom-Demathieu Bard remporte le projet de l’Aire des Vents, la construction du Plateau, second volet du futur Village, revenant au promoteur Ametis. L’ensemble s’intégrera au sein de la Zac du Cluster des Médias, aménagée par la Solideo ; cette Zac, d’une superficie totale de 70 hectares, s’étend sur les communes de Dugny, du Bourget et de La Courneuve, toutes trois en Seine- Saint-Denis. Le Village des Médias, quant à lui, se développera sur 12 hectares.

Réversibilité

Les travaux ont démarré au cours du quatrième trimestre 2021 et le gros œuvre a été finalisé en mai 2023. Le projet doit être remis à la Solideo le 31 décembre prochain au plus tard, puis mis à disposition de Paris 2024 le 31 mars suivant. « A l’issue des Jeux, le secteur de l’Aire des Vents sera reconverti en un nouveau quartier, appelé « Esprit 24 », véritable cité jardin du 21ème siècle d’une superficie de plus de 62 000 m2, intégrant 40 % d’espaces de pleine terre » précise Loïc Madeline, directeur général de Sogeprom, en charge de l’activité Ile-de-France. Là réside la particularité du projet, son essence même : sa réversibilité. Comme le Village des Athlètes, celui devant accueillir les journalistes est bâti pour du long terme. Aux journalistes succèderont, après le clap de fin des Jeux, des résidents de plein droit. Pour l’Aire des Vents, le projet a été scindé en deux : environ 450 logements seront livrés à la fin de l’année et mis à disposition de Paris 2024, tandis qu’une seconde tranche, totalisant également environ 450 logements, sera lancée post-JO. « Par rapport à ce qui va être réalisé pour le Village des Athlètes, les transformations seront moindres pour le Village des Médias, les logements devant juste subir une légère remise à neuf post-JO avant leur commercialisation » fait valoir Philippe Jung. Si l’on compte le lot remporté par le promoteur Ametis, près de 1 300 logements seront sur le marché à l’issue des épreuves. Pour l’heure, environ 70 % du programme résidentiel conçu par le duo Sogeprom-Demathieu Bard a d’ores et déjà été vendu, entre les ventes en blocs et celles aux particuliers. « Nous couvrirons l’ensemble du parcours résidentiel, avec de l’accession à la propriété (zones « Anru » à TVA réduite à 5,5 %), de l’intermédiaire, du social » promet Philippe Jung. En proportions, il en résultera un peu moins de 20 % de logements sociaux, un tiers de logements intermédiaires et un tiers de logements en accession libre.

« Là réside la particularité du projet, son essence même : sa réversibilité »

Appartements évolutifs

Il est à relever que l’ensemble des appartements du studio au cinq pièces, bénéficieront d’une double orientation et d’espaces extérieurs. De plus, à partir du quatre pièces, les appartements seront évolutifs, selon le concept Evoluvie©, qui permet de s’adapter aux mutations sociologiques impactant le logement. Explications de Philippe Jung : « aujourd’hui, les cellules familiales sont plus éphémères, évoluent plus rapidement, avec les familles recomposées, monoparentales, les colocations… C’est pour faire face à cette nouvelle donne qu’un T4 pourra être réaménagé en T3, plus un studio en lieu et place de la pièce supprimée, pour diviser l’appartement en deux, via la transformation d’une porte en cloison. Idem pour un T5″…

Le site, à la conception duquel collaborent trois cabinets d’architecture (Hardel Le Bihan, Bathilde Millet et Bourbouze & Grindorge) et une agence de paysagisme (D’ici Là), s’inscrira, une fois les Jeux bouclés, dans un microcosme comprenant une résidence services seniors, une résidence univer- sitaire/jeunes actifs, une résidence handicap universel, une crèche, un gymnase, un espace culturel, un café vélos et une conciergerie de quartier. Les pieds d’immeubles seront retravaillés, notamment pour y favoriser l’implantation de commerces. Les logements offriront des vues dégagées sur deux grands parcs, dont le parc Georges-Valbon et ses quatre hectares (troisième plus grand parc d’Ile-de-France). Enfin, une passerelle reliant les communes de Dugny et du Bourget sera bâtie et exclusivement réservée aux mobilités douces.

Optimisation des matériaux

Vient l’un des aspects centraux du futur site : sa dimension environnementale. « Esprit 24 offrira un contraste avec l’image qui peut parfois être véhiculée par la Seine-Saint-Denis, celle d’un département dense, bétonné, disposant de rares espaces verts » défend Philippe Jung. Le terme de « cité-jardin » prend ici tout son sens, avec l’aménagement de « toitures et jardins sanctuaires pour la biodiversité ». D’ailleurs, le Zan (zéro artificialisation nette des sols) est respecté, puisque le site est bâti sur l’ancien lieu où la Fête de l’Humanité prenait chaque année ses quartiers, plus précisément sur le parking construit à cet effet. Tous les bâtiments seront labellisés E3C1, pour un seul E3C2, et le site dans son ensemble sera labellisé BiodiverCity® et visera le DPE A.

Parmi d’autres innovations, notons que la construction de la future résidence universitaire se fera selon la technologie dalle bois-béton (dalle BB) ; intégrée lors de la conception des opérations, cette innovation consiste en la fabrication de planchers intermédiaires préfabriqués bois/béton, au lieu du 100 % béton. Techniquement, le plancher intègre un panneau de laine de bois dans sa préfabrication, ce qui permet à la résidence de réduire de 50 % son empreinte carbone par rapport à une construction en dallage 100 % béton. « Notre leitmotiv : le bon matériau au bon endroit » proclame Loïc Madeline. « Nous ne sommes pas dogmatiques, nous souhaitons tendre vers le projet le plus éco- responsable possible. Mais nous ne pouvons pas recourir à du 100 % bois, donc nous avons cherché le meilleur compromis possible. Nous sommes dans une démarche d’optimisation des matériaux ». D’autre part, un béton très bas carbone, de Hoffmann Green, a été utilisé pour le projet ; il présente un bilan situé entre 70 et 90 kilogrammes de CO2/m3, contre 250 kilogrammes de CO2/m3 pour un béton classique. L’ensemble du quartier est relié à un système de chauffage urbain, à base de géothermie. Le réemploi a, enfin, été placé au cœur du projet, conformément au souhait d’optimisation des matériaux théorisé plus haut par le directeur général de Sogeprom.

Reconnecter des espaces

Les deux acteurs semblent, en tout cas, ravis de faire partie intégrante d’une telle aventure. « Nous sommes fiers de participer à la réalisation des infrastructures pour accueillir cet événement sportif, en concevant depuis le début la phase « d’héritage » et en répondant, ainsi, aux exigences d’un quartier résidentiel de Dugny et d’un territoire à fort développement tel que la Seine-Saint- Denis » conclut Loïc Madeline. « L’importance accordée à la mixité d’usage, au choix des matériaux et à la biodiversité s’accorde parfaitement à l’ADN de Sogeprom, en tant que promoteur responsable ». Isabelle Valentin, directrice générale adjointe de la Solideo, ne dit pas autre chose : « de la rénovation du parc sportif et scolaire du Bourget à la passerelle entre Dugny et cette même ville du Bourget, réservée aux mobilités douces, le Cluster des Médias vient reconnecter des espaces jusqu’ici éloignés les uns par rapport aux autres. C’est un véritable projet de territoire qui s’adresse à l’ensemble des riverains et des usagers ». Rendez-vous pour les JO !

Médaille d’Or immobilière !