La France manque cruellement de logements. Le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre fait un constat alarmant sur la situation du logement en France : 4 millions de personnes sont aujourd’hui non logées ou mal logées.

Je suis frappé de constater que ce secteur d’activité pourtant stratégique n’a pas été une priorité de l’exécutif au cours des dernières années, et d’autant plus inquiet de voir que le logement est un thème encore trop absent du débat de la présidentielle. Alors que tous se concentrent sur les dépenses énergétiques, le logement est le parent pauvre de la campagne alors qu’il constitue la première dépense des Français ! Et celle-ci n’a cessé de progresser, notamment parce que notre pays ne produit pas suffisamment de logements pour les travailleurs de première ligne, les ouvriers ou les classes moyennes. Résultat : le coût du logement a explosé et ce sont les Français qui en font les frais.

Le rapport sur l’état du mal-logement, publié par la Fondation Abbé Pierre, indique que le nombre de nouveaux permis de construire est, en effet, en baisse depuis plusieurs années : de 500 000 en 2017 à 381 000 en 2020. La construction a légèrement augmenté en 2021 (470 000), mais cela est très insuffisant pour rattraper le retard engendré par les années précédentes et pour faire face aux défis du logement pour les années à venir. Par ailleurs, le nombre d’agréments de logements sociaux a lourdement chuté : 124 000 logements en 2016, 105 000 en 2019 et 87 000 en 2020. Pis encore, nombre de ces agréments ne donneront pas nécessairement lieu à des livraisons effectives de logements.

Les refus d’accorder des permis de construire ont pour conséquence directe une augmentation quasi- ininterrompue des prix de l’ancien et du neuf dans les métropoles. L’absence d’une offre abordable, en plus d’exclure certaines classes sociales des centres- villes, détériore considérablement les conditions de vie des salariés « non-télétravaillables », pourtant indispensables au bon fonctionnement de la vie économique, contraints de vivre de plus en plus loin de leur lieu de travail pour trouver des logements à prix abordable. Celui-ci est lentement en passe de devenir un produit de luxe, alors que c’est un bien de première nécessité.

J‘appelle les candidates et les candidats à s’emparer de ce sujet fondamental pour le pouvoir d’achat et la qualité de vie de nos concitoyens, et d’en faire une priorité nationale.

J‘appelle à la mise en place d’une réforme structurelle du secteur, qui imposerait des objectifs de construction très ambitieux aux exécutifs locaux. Pour répondre à l’urgence de la crise du logement, nous proposons des actions de court terme, comme :

Demander au pouvoir exécutif un ministère de plein exercice pour le logement

Notre ministre du Logement est aujourd’hui ministre déléguée, sous la tutelle d’un autre ministère. Les enjeux liés au seul logement sont suffisamment nombreux, denses et importants pour mériter un ministre de plein exercice, autonome et indépendant.

Soutenir financièrement les maires bâtisseurs

La sous-production de logements sur certains territoires tendus semble trouver son origine dans les visées électoralistes des élus locaux. À tort ou à raison, la théorie du « maire bâtisseur, maire battu » s’est répandue dans la plupart des métropoles où les besoins de logements sont pourtant criants. Il faut retisser un lien de confiance entre les acteurs de la promotion et les élus afin de réhabiliter et faciliter l’acte de construire dans l’intérêt général. Sur le plan local, il faut donner la priorité d’attribution des logements sociaux aux élus de la commune et soutenir financièrement les collectivités situées en zones tendues qui font le choix de construire davantage de logements. De même dans chaque métropole française, il faut fixer un objectif contractuel de production qui pourrait donner lieu à un bonus ou un malus financier en fonction des mises en chantiers réellement constatées.

Enfin, pour redoter la France de logements attractifs et moins coûteux, nous proposons des actions de long terme, comme :

Construire plus pour enrayer la hausse continuelle du prix de l’immobilier dans notre pays

Il faudrait construire près d’un million de logements par an en France pour résoudre la crise du logement, et nous en sommes très loin. Pour enfin relancer la construction de logements en France et créer un choc de l’offre, je propose des mesures simples comme réduire les délais d’instruction des permis de construire par les collectivités afin d’accélérer les mises en chantier ; ou inciter les cessions d’immeubles au profit d’organismes de logements sociaux en supprimant la taxation sur la plus-value des personnes morales soumises à l’impôt sur les sociétés.

Assumer l’attractivité des métropoles

Près de deux ans après le début de cette crise, le phénomène d’exode urbaine annoncé n’a pas eu lieu, ni en France ni dans aucun pays du monde. Ceux qui quittent l’Ile-de-France vont souvent rejoindre une autre métropole comme Bordeaux, Nantes ou Marseille. Pour ceux qui font le choix d’une ville moyenne, il s’agit le plus souvent d’un territoire à moins d’une heure de TGV de la Capitale. Le constat est donc sans appel : les métropoles continuent de polariser l’attractivité, tandis que les villes moyennes, plus éloignées des grands centres, peinent à attirer. La majorité de nos concitoyens souhaite habiter dans des bassins d’emplois, bien desservis par le réseau autoroutier et ferroviaire, et dotés d’infrastructures scolaires, médicales et culturelles. C’est là qu’il faut densifier les constructions, et non dans les périphéries. Il faut, dès lors, assumer vouloir densifier nos métropoles, quitte à favoriser l’habitat collectif et surélever certains immeubles existants.

Hervé Legros (Alila) : "remettre le logement au cœur de nos priorités"