La ritournelle est maintenant connue de tous : les taux d’intérêt des banques continuent de croître, éloignant de plus de plus de Français de son accès ; la demande s’en trouve conséquemment diminuée, sans pour autant que l’offre ne décolle réellement, entravée à la fois par l’immobilisme du parcours résidentiel (ce qui ne permet pas de libérer les biens occupés), mais aussi par le gel d’un certain nombre de projets de construction. Voilà pour la toile de fond. Laforêt décrypte, malgré tout, les principales données enregistrées à l’issue du premier semestre 2023, qui accentuent certaines tendances décrites plus haut. C’est le cas de la baisse de la demande, qui a chuté de 15 % au premier semestre 2023 par rapport à celui de 2022, particulièrement en Ile-de-France (-16 %) et en régions (-16 %). Les secundo-accédants sont sureprésentés : -54 % de demandes entre 2022 et 2023. Suivent les primo (-27 %) et les investisseurs (-19 %). « Le parcours résidentiel étant grippé, les secundo-accédants ont tendance à différer leurs projets de déménagement, ce qui renforce mécaniquement le phénomène dont ils sont victimes » décrit Yann Jéhanno, le président du réseau.

Pour les primo-accédants, le passage d’un taux d’intérêt de moins de 1 % à un autre à presque 3,5 % en 18 mois a logiquement conditionné leur volonté d’achat au respect de critères plus drastiques. Deux solutions s’offrent à eux : soit différer leur achat dans l’attente d’une hypothétique baisse des taux, soit faire des compromis. « Les primo-accédants qui ont acheté au cours de ces six derniers mois ont forcément dû renoncer à quelques chose, accepter de faire des concessions : cela peut être sur une surface habitable rognée par rapport aux projections initiales ou alors sur un emplacement géographique différent. En Ile-de-France, le simple fait de s’éloigner de quelques kilomètres de Paris, voire, dans une commune, des principales gares et autres points de mobilité peut contribuer à faire baisser le prix d’un bien et à rendre, du même coup, un projet d’achat réalisable » poursuit Yann Jéhanno.

Restent les investisseurs qui, échaudés par l’accumulation de normes environnementales toujours plus contraignantes et surtout onéreuses (rénovation thermique), sont de plus en plus réticents à se lancer dans l’investissement locatif.

Des stocks de biens gonflés

Concernant les offres, elles ont connu une augmentation de 35 % entre 2022 et 2023. « C’est un chiffre en trompe-l’œil » tempère Yann Jéhanno. « Malgré une reconstitution progressive de l’offre de biens disponibles à la vente, celle-ci reste insuffisante pour permettre à la fois d’assurer la fluidité nécessaire, afin de répondre à la demande, mais aussi de favoriser une franche baisse des prix. Concrètement, une agence immobilière qui disposait auparavant de 10 biens à la vente en propose désormais 13 ; c’est insuffisant pour répondre à une demande immobilière globalement supérieure à l’offre ». Les biens ayant également davantage de difficultés à être vendus, pour cause d’immobilisme du parcours résidentiel, leur durée de mise sur le marché s’étire, ce qui gonfle les stocks de biens à vendre, sans que cela ne soit révélateur d’un réel rebond de l’offre…

Pour autant, les vendeurs diffèrent-ils leur choix de se séparer d’un bien ? « Non, car environ 70 % des projets de vente doivent être enclenchés rapidement » détaille le président du réseau Laforêt. « C’est le cas lorsqu’il y a un changement de travail, l’arrivée prochaine d’un enfant ou encore une séparation brutale : le déménagement doit se faire vite, ce qui précipite d’autant plus la vente de l’actuel logement, sans trop avoir le luxe de s’attarder sur la conjoncture économique. » A l’inverse, les projets de vente dits de confort, non contraints (avoir une pièce en plus pour y stocker des affaires, projet de déménagement à la campagne ou en province…) peuvent, eux, être différés, en attendant que le contexte économique permette de réaliser une plus-value plus importante ; ou, au contraire, précipités, de peur que ledit contexte ne se dégrade encore davantage…

Enfin, concernant les prix, ils ont connu une légère baisse (-4,3 %) à Paris, ce qui a permis de descendre en-dessous de la barre des 10 000 euros le mètre carré (9 989 euros), en moyenne. Néanmoins, les prix restent très élevés et les biens pratiquement inaccessibles pour la plupart des primo-accédants. D’autres zones ont, quant à elles, connu des hausses importantes, notamment en Bretagne et sur la côte Atlantique, comme à Lorient (+6 %) ou à La Rochelle (+6 %). Une conséquence directe de l’afflux de nouveaux arrivants…

Pour le réseau Laforêt, le marché immobilier "plie, mais ne rompt pas" au 1er semestre 2023