Doit-on déplorer la « mort » prochaine du dispositif Pinel ? La Cour des Comptes n’aura pas attendu la disparition officielle de la mesure, qui interviendra en janvier prochain, pour en dresser l’inventaire, tantôt complaisant, tantôt sévère. Dix ans après sa mise en place, la mesure fait l’unanimité quant à son important coût pour les finances de l’Etat : sept milliards à date, mais la facture va continuer de grimper jusqu’en 2038, les particuliers ayant acquis un logement éligible au Pinel pouvant bénéficier d’une réduction de leur impôt sur le revenu pendant six, neuf ou douze ans. Le total du coût pourrait donc avoisiner les 10 à 12 milliards d’euros pour les finances publiques.

Au-delà de son coût, la mesure a-t-elle au moins été efficace pour loger les moins aisés ? « Le dispositif Pinel semble avoir eu un réel effet volume » relève la Cour des Comptes, surtout sur la Vefa (vente en l’état futur d’achèvement). En clair, l’instance reconnaît que nombre de logements intermédiaires ont pu voir le jour grâce au Pinel et que, par conséquent, des ménages ont pu être logés grâce à ce dispositif, surtout dans les zones tendues. Des ménages dont le profil était celui recherché par la mesure : jeunes, actifs, modestes et souhaitant être logés à proximité de leur lieu de travail.

En revanche, les angles morts du Pinel ne tardent pas à être signalés : au terme de six, neuf ou douze ans d’engagement, les logements sont souvent revendus et cessent d’être loués à des tarifs abordables et à un public modeste. Premier loupé. Ensuite, le zonage n’a pas toujours été bien étudié. Du coup, un certain nombre d’immeubles bâtis ont rencontré une vacance due à un emplacement déserté, sans bassin d’emplois environnant ou aménités (commerces, crèches, écoles…) rendant l’endroit attractif. Et c’est là que le coût de la mesure pose problème, lorsque la construction s’est avérée vaine et inutile…

Le rapport de la Cour des Comptes a été inégalement saluée par les acteurs de l’immobilier, selon leur fonction. Les promoteurs se sont logiquement attardés sur les points positifs de la mesure, eux qui ont profité du Pinel pour voir leur carnet de commandes s’étoffer. Nous relations hier dans nos colonnes que la FPI avait remercié les sages de la rue Cambon pour leur clairvoyance et leur honnêteté quant aux bienfaits de la mesure. Suffisant pour que Pascal Boulanger, président du groupement de promoteurs, appelle le nouveau gouvernement à revoir sa copie et à prolonger la mesure (son abandon avait été décidé sous le gouvernement d’Elisabeth Borne). Jacques Ehrmann, délégué général d’Altarea, a fustigé les contempteurs du Pinel, affirmant que « le rapport de la Cour des Comptes {balaie} toutes les âneries dites sur le Pinel. Ce rapport dit clairement que le chien n’a pas la gale ! ». D’autres, moins « fans du dispositif », mettent en avant les inconvénients que relève le rapport, comme l’opacité sur le nombre exact de logements qu’il a contribué à faire construire ou encore les erreurs de déclaration dues à la complexité du processus. A rapport égal, interprétations opposées…

Pinel : drôle de règlement de comptes