Tout débute en 1984, quand Bernard Hanon, patron de Renault, demande à l’architecte Claude Vasconi d’imaginer le premier édifice de la future cité industrielle du groupe, à Boulogne-Billancourt. De cité il n’y eut pas, le projet ayant été rapidement abandonné. Seul bâtiment en fonctionnement de ce lieu perdu, « 57 Métal », reconnaissable à ses sheds (toiture en dents de scie formée d’une succession de toits à deux versants de pente différente, le plus court étant généralement vitré, ndlr). Une architecture qui a valu à son auteur le Grand Prix National d’Architecture.

En 2004, l’immeuble connaît sa première reconversion, menée par les architectes Jakob+MacFarlane. La grande halle, rebaptisée « Square Com », accueille alors les grands événements de communication de Renault jusqu’en 2012, date à laquelle l’entreprise déménage et où le site devient inoccupé. C’est quelques années plus tard que la mairie de Boulogne-Billancourt fait appel à BNP Paribas Real Estate pour sauver l’immeuble et trouver une troisième vie à ce site. Elle lui sera donnée par Dominique Perrault qui, en accord avec les ayants droit de Claude Vasconi, imagine « Métal 57 ».

Une nouvelle histoire pour un bâtiment « vestige » de l’histoire industrielle

« C’est un bébé sur lequel nous travaillons depuis sept ou huit ans, nous portons ce rêve aujourd’hui devenu réalité avec notre architecte fétiche, Dominique Perrault » explique Thierry Laroue-Pont, président de BNP Paribas Real Estate. Il ajoute bien mesurer le « challenge important » que représente le fait de « réinventer un immeuble emblématique de cette architecture industrielle qui a marqué le siècle ». Mais l’aventure entre le groupe et l’architecte a commencé bien avant celle de ce nouveau bâtiment (propriété de CDC Investissement Immobilier et les Assurances du Crédit Mutuel), avec la transformation des tours du pont de Sèvres qui a, explique Dominique Perrault, « tissé des liens entrer BNP et [nous], une vision partagée sur la ville, la société, [nos] entreprises et sur la relation qu’on pouvait avoir avec ceux qui y travaillent ». Elle s’est donc poursuivie assez naturellement avec « Métal 57 » et la volonté de BNP Paribas Real Estate de créer ici son siège social « dans un esprit de vraie durabilité : comment lire l’histoire, comment analyser, définir la substance patrimoniale d’un bâtiment qu’on considère comme remarquable ».

Un bâtiment inscrit dans une « relation paisible » avec son environnement

Le projet consiste en la démolition partielle, conservation et réhabilitation d’environ 50 % du bâtiment Vasconi existant, et la création d’une extension, le tout formant un ensemble d’environ 37 000 m2 de surface de plancher. L’extension, de verre constituée, vient s’adosser aux « sheds » conservés, se déploie sur huit étages et est surplombée d’un « rooftop » végétalisé. Le design de ce nouvel immeuble est composé d’un assemblage de grandes briques de verre aux lignes très marquées, reproduisant le dessin de la façade historique de l’immeuble de Vasconi. « Ce bâtiment consomme moins de surface de terrain : l’emprise est moins importante que celle occupée par l’ensemble réalisé à l’origine » souligne, par ailleurs, Dominique Perrault, qui considère que cela contribue à « une relation plus paisible avec l’environnement, la ville et permet de mieux accompagner ceux qui vont venir dans ce bâtiment pour y travailler, s’y restaurer ».

Flexibilité et nouveaux usages

Au sein de ce nouveau lieu, les équipes de BNP Paribas Immobilier, qui occuperont 18 000 m2, seront bientôt rejointes par celles de Kronenbourg et de la société Odigo. Pour ses collaborateurs, le groupe immobilier a choisi une configuration hybride et flexible : zones de coworking, salles de réunion, petits « labs », « mini-amphis » ou encore « work café », qui constituent 80 % de la surface totale. L’aménagement a été conçu pour permettre aux collaborateurs de se rencontrer, d’échanger et travailler en équipe. Les salariés disposent également d’un « customer Experience Center » (ou CXC), de multiples espaces de codéveloppement interactifs qui hébergeront régulièrement clients, collectivités ou startups. Également installé à « Métal 57 », un showroom de 500 m2 présentant échantillons de matériaux et aménagements qui seront présents dans les immeubles résidentiels réalisés par le groupe.

Le « rooftop » végétalisé, voulu par BNP Paribas Real Estate et orchestré par sa directrice développement durable/RSE, Catherine Papillon, propose une ferme urbaine qui approvisionnera en circuit court des restaurateurs du « food hall ». « Situé dans un maillage de parcs et d’espaces boisés (forêt de Meudon, bois de Boulogne…) accueillant une forte population d’oiseaux et d’insectes, l’immeuble assure une fonction de relais écologique avec, en « rooftop », une zone sanctuarisée composée d’habitats pour la biodiversité » souligne BNP Paribas Real Estate. Et Catherine Papillon d’expliquer qu’ « en parallèle, des mesures préventives ont été prises pour limiter le risque de collision des volatiles dû à la transparence des vitrages ». A noter que les espaces végétalisés seront entretenus en partie par des personnes travaillant en Esat (établissement ou service d’aide par le travail) ou encore par des étudiants demandeurs d’emplois et des scolaires de la ville. « Metal 57 » fera également sa place à l’art, dans le cadre de la charte « 1 immeuble – 1 œuvre » du ministère de la Culture. Des œuvres d’art seront bientôt installées. Enfin, toujours dans le cadre d’une atteinte maximale de ses objectifs RSE « Métal 57 » vise les certifications et labels BREEAM – « Excellent », BiodiverCity, Effinergie + (partie neuve), BBC (partie réhabilitée), WiredScore « Platinium », HQE « Exceptionnel » (partie neuve) et « Excellent » (partie réhabilitée), et Osmoz.

Un immeuble ouvert à son environnement

Au cœur de l’immeuble, au rez-de-chaussée, un grand passage couvert, reliant la rue du vieux Pont de Sèvres au cours de l’Ile Seguin. Cet espace de 5 000 m2 de services propose, notamment, un food hall avec des lieux de restauration, une salle de sport, un auditorium vitré de 285 places modulable en lieu de réception ou encore un business center. Cette véritable rue intérieure, qui lie l’immeuble au quartier, sera accessible à tous. Grâce à elle, le bâtiment d’origine, renfermé sur lui-même, s’ouvre à l’extérieur : « à partir du 2ème trimestre 2023, l’espace, tout comme les parkings, sera accessible au public » confirme Thierry Laroue-Pont. Il ajoute : « cette hybridation public privé nous va bien ». Une initiative saluée aussi par l’architecte : « la partie basse, ouverte au public, traduit l’ancrage du bâtiment dans ce territoire, un ancrage qui prend en compte un environnement, des usages de vie, de travail. Ce siège social n’est pas dans un dispositif d’autorité, mais de bienveillance pour ceux qui sont à l’intérieur et à l’extérieur. Il possède une vraie dimension holistique, pour une relation heureuse et harmonieuse. Nous n’avons jamais créé un siège avec une telle histoire. Nous sommes dans un bâtiment qui vit, mais on ne peut faire de bâtiment marqueur si on n’a pas un client marquant » conclut Dominique Perrault…

"Métal 57" ou quand BNPPRE et Dominique Perrault réinventent un patrimoine industriel