Le moment est opportun pour lancer cet appel à l’union, alors que le Congrès HLM démarre ce mardi 3 octobre (jusqu’au 5) à Nantes. Dans sa tribune, Eddie Jacquemart n’y va pas par quatre chemins pour décrire la situation sociale que traverse le pays : « la rentrée 2023 est celle de la pénurie et de la précarité. Avec une inflation à plus de 5 %, de nombreux ménages s’enfoncent dans la pauvreté, car les salaires stagnent, tandis que les loyers augmentent plus vite que les revenus ». Voilà pour le décor. Factuel. Une situation telle que, selon les bailleurs, les impayés de loyers et de charges auraient bondi de 10 % en un an.

Le président du CNL tance logiquement le Chef de l’Etat, auquel il adresse le reproche habituel de se désintéresser du logement, d’y être totalement aveugle. Il fustige la volonté du gouvernement de décentraliser encore davantage la politique du logement, qu’il perçoit plutôt comme une volonté de décentraliser le problème sans avoir à le résoudre. « Cela peut constituer un leurre de plus et s’avérer l’ultime palier du désinvestissement de l’Etat ».

Surtout, Eddie Jacquemart s’inquiète de la concentration de précarité qu’induit inévitablement une pénurie de logements sociaux. Rien qu’en Ile-de-France, il il indique qu’il faut, en moyenne, attendre onze ans pour obtenir une place en HLM, alors même que 80 % de la population francilienne y serait éligible. Résultat : 50 % des entrants d’aujourd’hui vivraient sous le seuil de pauvreté ou gagnerait tout juste le Smic. La ghettoïsation des quartiers tend à tuer dans l’œuf la dimension universelle originellement assignée au logement HLM. La non-mixité est, de plus, un argument supplémentaire fourni sur un plateau aux tenants d’un discours anti-banlieue, selon le président du CNL : « le mélange des catégories sociales et des populations a historiquement permis aux HLM de jouer un rôle d’ascenseur social, de vivier culturel, d’innovation et d’émancipation ».

Après le constat, viennent les propositions. Eddie Jacquemart invite le pouvoir à construire 250 000 logements sociaux par an et sur toute la durée d’un quinquennat. Il réclame un tour de vis répressif vis-à-vis des maires qui ne respecteraient pas la loi SRU (« le mélange des classes sociales est au cœur du pacte républicain »). Il propose qu’à la place d’amendes « qui n’effraient en rien les élus ségrégationnistes », des peines dissuasives allant jusqu’à leur inéligibilité soient appliquées.

Le président du CNL se veut également volontaire en matière de rénovation énergétique des bâtiments. Il en appelle à la responsabilité de Bruno Le Maire, dont les atermoiements des derniers jours l’inquiète : « en 2023, la mise en location des passoires thermiques F et G a été interdite, pourtant Bruno Le Maire n’a pas hésité à se dire favorable à leur retour sur le marché locatif. Le ministre de l’Economie a-t-il conscience de l’indignité de ses propos dictés par la volonté de consentir un nouveau cadeau aux multi-propriétaires ? Jusqu’où le cynisme et l’aveuglement sur les enjeux de décarbonation des bâtiments ? ». Il ajoute également que, contrairement aux idées reçues, le secteur HLM n’est pas le mauvais élève de la classe en ce qui concerne la consommation énergétique : ainsi, 46 % des logements sociaux se classeraient dans les catégories A, B ou C du DPE, contre 25 % pour la totalité du parc. Il plaide, enfin, pour un bilan du dispositif MaPrimeRénov’, qu’il considère comme étant un échec : « l’urgence est que l’Etat garantisse à toutes et tous la possibilité d’effectuer leurs travaux de rénovation, notamment via la rénovation de 700 000 logements privés ».

Face aux 16 milliards d’euros d’économies de dépenses budgétaires que prévoit le projet de loi de finances 2024, Eddie Jacquemart se dit inquiet. Il demande instamment la fin des expulsions locatives, la maîtrise des quittances, la réglementation du prix de l’énergie et le blocage des prix des produits de première nécessité.

La Confédération nationale du Logement lance un appel