Il est attendu de pied ferme : à l’occasion du congrès annuel de l’Unis, le fraîchement émoulu ministre du Logement Patrick Vergriete n’échappera pas aux propositions figurant sur la feuille de route esquissée par Danielle Dubrac et ses équipes. Aux côtés du ministre, une autre figure politique bien connue des acteurs du logement a prévu de se rendre dans la cité phocéenne pour participer au congrès : Dominique Estrosi-Sassone, sénatrice des Alpes-Maritimes et vice-présidence de la chambre haute. Sa collègue de l’Assemblée nationale, Claire Pitollat, députée des Bouches-du-Rhône, participera également aux débats, qui auront trait aux politiques de rénovation et du logement.

« Après le trou vert, voici venu le temps du trou noir ! » Danielle Dubrac n’a pas hésité à filer la métaphore pour décrire la situation que traverse le logement : disparition des primo-accédants, avec une baisse des volumes de ventes qui atteint -15 % et un tiers des ventes qui ne se réalisent pas ; manque d’offre en location résidentielle de longue durée ; chute de la construction ; cessations d’activités des entreprises immobilières… Pour l’instant, 2023 fait figure d' »anus horribilis » sur le front du logement…

Face à ce constat, l’Unis a décidé de passer à l’action en proposant des solutions fortes. Sur l’accession, l’Union des syndicats suggère de débloquer l’accès au logement des primo-accédants, par exemple en allongeant la durée des prêts pour que les mensualités à rembourser soit plus faibles car diluées dans le temps ; « avec l’allongement de la durée du travail, comme prévu dans la loi retraite qui a été votée », il ne serait pas absurde d’envisager cette solution comme réalisable ». L’Unis propose également la suppression, pendant un temps limité, des droits de mutation à titres onéreux (DMTO) pour les primo-accédants.

Sur la rénovation, l’Unis n’écarte pas un prochain recours à une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) concernant certaines dispositions de la loi « Climat et Résilience », plus précisément en faisant un recours contre le décret « décence énergétique » devant le Conseil des sages. Petit aparté juridique, une QPC permet à tout justiciable de contester la constitutionnalité d’une disposition législative applicable à son affaire s’il considère qu’elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution. Dans le cas qui nous intéresse, l’Unis souhaite que distinction soit faite entre l’habitabilité et la performance énergétique et ce, dans le but de concilier plusieurs droits : propriété/accession, logement et environnement. Dit autrement, qu’hormis les passoires thermiques les plus indigentes, les logements qui ne sont pas nécessairement les plus conformes aux normes en vigueur ne soient pas systématiquement retirés du marché de la location dans un contexte où le droit à être logés, et le devoir de l’Etat à garantir ce droit à ses citoyens, sont plus que jamais en train de vaciller, pénurie de l’offre et demande abondante obligent.

Parmi les autres propositions faites au sujet de la rénovation figurent l’ajustement du DPE aux petites surfaces, « qui pâtissent d’une note abusivement dégradée », une dérogation aux interdictions de louer en cas de vote d’un PPT (Plan pluriannuel de travaux), un DPE collectif avec opposabilité et primauté sur l’individuel, une facilitation du vote de commandes groupées afin de faciliter la rénovation globale et la création d’une banque de rénovation sur le modèle de la Banque des Territoires.

Enfin, l’Unis propose de décentraliser la politique du logement et de nouer un partenariat avec les pouvoirs publics. « Nous nous interrogeons à propos de la multiplication des encadrements des loyers, sans bilan des expérimentations anciennes, mais aussi de l’absence de prise en compte du DPE dans les grilles des loyers, conjuguée à la hausse des taxes foncières et à la multiplication des taxes immobilières au moment où les injonctions de rénovation n’ont jamais été aussi fortes » a affirmé Danielle Dubrac. L’Unis plaide, de même que plusieurs autres acteurs, pour la création d’un statut du bailleur particulier, de même que pour un développement conséquent de logements intermédiaires. Et ce dans un contexte de saturation du parc social, entravant le parcours résidentiel et ne permettant pas aux deux millions de demandeurs de logement social de voir leur requête aboutir. Une plus grande territorialisation de la politique du logement est aussi réclamée. « Notre rôle de syndicat professionnel est de rechercher à tous les niveaux le chemin pour sortir de la crise, de nouer un partenariat avec les pouvoirs publics pour le déploiement d’une politique du logement équilibrée, décentralisée et efficace » a conclu Danielle Dubrac.

Crise du logement : l'Unis avance des propositions