Afilog, l’association des acteurs de l’immobilier logistique et industriel, a organisé sa conférence annuelle ce mardi 10 octobre à l’Hôtel de l’Industrie (6ème), réunissant plus de 150 acteurs de la filière, élus et représentants de l’Etat. A cette occasion, Afilog a lancé une grande mobilisation de ses membres pour transformer les entrepôts logistiques en centrales énergétiques, montrer la progression de la filière sur ses autres engagements environnementaux et rappeler le rôle de la logistique dans la réindustrialisation du pays… Rôle mis à mal par la crise du foncier que traverse l’immobilier logistique et industriel.

C’est une initiative volontaire et proactive, co-construite par les acteurs de la filière, en lien avec les services de l’Etat. Les spécialistes des entrepôts en France sont, en effet, engagés depuis plusieurs années dans un mouvement de couverture de leurs toitures et parkings, qui s’est traduit en 2021 dans la Loi Climat (obligation de couverture de 30 % des toitures d’entrepôts neufs ou réhabilités) et dans une Charte d’Engagements réciproques avec l’Etat (objectif volontaire d’atteindre 50 %). Son accélération a été actée lors de l’Université de la Ville de Demain, en juillet dernier, en présence de 200 décideurs de la ville, des territoires et du monde de l’énergie, avec la création de groupes de travail chargés de traiter les freins techniques (renforcement des toitures, étanchéité…), réglementaires (réinjection d’énergie sur site, localement ou dans le réseau) et financiers.

« De la même façon qu’il n’y a jamais eu de grande victoire dans l’Histoire sans victoire logistique, il n’y aura pas de révolution écologique sans révolution logistique. L’immobilier logistique et industriel est aujourd’hui à un tournant de son histoire, où il peut et il doit devenir l’une des clés de la transition environnementale : pour mailler le territoire, pour optimiser les flux de marchandises, pour produire de l’énergie renouvelable, pour épauler la réindustrialisation de la France » assure Claude Samson, président d’Afilog.

Cette mobilisation va surtout représenter une part importante de la mobilisation nationale que s’apprête à lancer le gouvernement, dans le cadre de la Stratégie française énergie-climat. Les groupes de travail, à la demande du ministère de la Transition Energétique, ont, en effet, recommandé le mois dernier de doubler le rythme d’installation de centrales photovoltaïques en France (à 5,5 GW/an) en utilisant davantage les « grandes toitures » (25 % du total). Autrement dit, la mobilisation des membres d’Afilog pourraient représenter près de 5 % de l’objectif national de puissance installée et 20 % de l’objectif national de déploiements de centrales solaires en toiture.

Une fois produite, l’énergie devra pouvoir être distribuée plus aisément

En même temps que l’engagement sur la production, les acteurs réunis veulent aussi mettre en place des dispositifs permettant de mieux redistribuer l’énergie ainsi produite. Il s’agit de développer l’autoconsommation collective et d’alimenter la mobilité durable.
L’énergie durable produite localement par les entrepôts devra être capable d’alimenter les collectivités, entreprises, industries, commerces ou habitants situés à proximité et qui ne peuvent pas autoproduire toute l’énergie dont ils ont besoin.
Elle visera également à alimenter des stations multi-énergies où les véhicules de tous ordres pourront venir se ravitailler.

Pour ce faire, des évolutions réglementaires seront nécessaires pour faciliter la revente locale d’énergie entre le producteur d’énergie PV et l’utilisateur final, et pour avoir plus de souplesse sur les quantités d’énergie réinjectées dans le réseau. Afilog veut ainsi travailler collectivement, aux côtés de l’Etat, sur les leviers à faire évoluer à plus long terme (tarif d’usage des réseaux de transport locaux de l’énergie, prix de revente, fiscalité énergétique…).

Afilog a présenté un bilan intermédiaire de la Charte d’engagements réciproques avec l’Etat basé sur un recensement récent auprès de ses membres signataires. Ce dernier a permis de quantifier précisément leurs avancées sur les engagements en faveur :

des énergies renouvelables : 90 % des projets d’entrepôts prévoient désormais de couvrir au moins la moitié de leur toiture avec des panneaux photovoltaïques (contre 60 % avant la signature de la Charte) ;
des études environnementales : 97 % des projets font l’objet d’une étude par un écologue, 97 % appliquent leurs recommandations (contre, respectivement, 100 et 96 %), et 97 % des projets ont une démarche de certification environnementale (contre 93 %) ;
de l’objectif Zéro artificialisation nette (Zan) : la majorité (55 %) des projets d’entrepôts sont désormais fléchés vers des friches et des sols déjà artificialisés. Un chiffre élevé, mais qui a connu une baisse depuis 2021 (contre 63 %), due à la moindre disponibilité de friches logistiques depuis le vote de la loi Zan ;
de la gestion durable de l’eau : 93 % des projets réinfiltrent l’eau pluviale au plus près de leur lieu de chute (contre 64 %) ;
de la biodiversité : 91 % des projets préservent la végétation autour du bâtiment et des voiries (contre 80 % auparavant). En particulier, 84 % des entrepôts signataires ont planté ou vont planter des haies champêtres sur au moins la moitié de leurs bordures (contre 83 %), 81 % plantent ou planteront des essences favorables aux pollinisateurs (contre 77 %) et 77 % des entrepôts ont une gestion écologique des espaces végétalisés (contre 86 %). 99 % des entrepôts ont mis ou vont mettre en place des dispositions pour accueillir la biodiversité sur les bâtiments (contre 86 % auparavant)

« Quand nous avons la maîtrise totale des sujets, nos projets remplissent les objectifs fixés, que ce soit en faveur de l’énergie ou de la biodiversité. Nous avons encore des efforts à produire et des combats à mener, sur la végétation et l’accès aux friches notamment » explique Salvi Cals, « managing director » de Panattoni France, et co-pilote de l’application de la Charte d’engagements chez Afilog.

Plusieurs membres d’Afilog s’apprêtent à signer à leur tour la Charte d’engagements ; ils seront rendus publics lors du prochain Comité Interministériel de la Logistique, en fin d’année. Parmi eux, la Société de Développement Axe Nord (SDAN), présente dans les Hauts-de-France et, notamment, dans le port de Dunkerque, illustre la dynamique à l’œuvre…

Afilog a rappelé le rôle de la logistique comme bras ouvrier de la réindustrialisation en France… tout en pointant la crise du foncier, qui le remet en cause

Selon CBRE, les acteurs industriels représentent une part de plus en plus importante de la demande de nouveaux entrepôts logistiques en France (15 % en 2022 comme en 2023, contre 2 à 3 % au début des années 2000). Les acteurs de l’industrie agro-alimentaire et automobile ont été particulièrement actifs. Les professionnels de la transaction immobilière notent une forte hausse des demandes traitées et en cours sur les 18 derniers mois. Les utilisateurs se positionnent principalement dans les régions où les réserves logistiques sont les plus importantes.

La situation du foncier en France pose question au développement de la logistique industrielle. D’après une étude conjointe de BNP Paribas Real Estate, Arthur Loyd, CBRE, EOL, JLL et Cushman & Wakefield, publiée au premier semestre, les deux-tiers des régions françaises sont en situation de forte tension, avec des taux de vacance inférieurs à 5 % dans les entrepôts logistiques, voire de pénurie (moins de 1 %). Résultat : les entreprises industrielles sont découragées d’évoluer, d’accepter de nouveaux contrats, de diversifier leurs activités ou de déménager pour s’agrandir ou se moderniser.

« Exception faite des Hauts de France, et à la marge du Centre Val-de-Loire et de la Normandie le long de l’axe Seine, c’est une situation qui touche la France entière, depuis plusieurs années maintenant. Elle demande plus que jamais une mobilisation urgente et ambitieuse de l’Etat et des collectivités pour mieux caractériser la demande en entrepôts, les disponibilités en friche… » explique Paulo Ferreira, directeur général associé de Virtuo Industrial Property et vice-président d’Afilog.

Afilog mobilise ses membres et compte déployer 5 millions de m2 de panneaux photovoltaïques en cinq ans