> Zac Lallier par Eiff age Immobilier, à L’Haÿ-les-Roses (94)

En quête de logements neufs

Malgré un léger mieux dans la construction en septembre dernier, la France va continuer à manquer de logements neufs. Une récente étude du ministère de l’Aménagement des territoires vient d’évaluer les besoins en logements neufs à 448 000 unités par an jusqu’en 2035 au moment où 372 731 logements ont été autorisés à la construction d’octobre 2024 à septembre 2025, soit 11,9 % de moins que la moyenne des cinq années précédentes…

« Il y a urgence à inciter les investisseurs particuliers à revenir vers l’immobilier locatif privé » alerte Pascal Boulanger, président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI). Un constat partagé par Méka Brunel, présidente de la Fondation Palladio : « ce n’est plus une crise, c’est une maladie chronique qui s’aggrave. Tout le secteur doit être repensé ». S’ajoutent, selon elle, deux autres chocs : l’accélération de l’intelligence artificielle (IA) et la crise démographique. La taille moyenne des ménages français est passée de 3,1 personnes par appartement à 2,1 et la moitié des primo-accédants vivent seuls. En parallèle, le pouvoir d’achat immobilier des Français a baissé d’environ 30 % depuis 2022…

En pleine crise du logement neuf, les promoteurs et les banques n’ont pas attendu les annonces majeures des gouvernements Barnier, Bayrou, et Lecornu aujourd’hui, pour attirer les futurs acquéreurs comme « l’extension du prêt à taux zéro (PTZ) sur tout le territoire » depuis le 1er avril 2025 pour l’achat d’un logement neuf individuel ou collectif ou les aides en faveur des maires bâtisseurs.

Pour sortir de l’impasse, Vincent Ego, directeur général du pôle Altarea Promotion et de Cogedim, le répète : « commençons, avant tout, à fabriquer des logements plus compacts, qui répondent aux besoins des primo-accédants, en termes de sociologie et de pouvoir d’achat (…) Ce sujet avance, par exemple, sur la Métropole de Lyon qui vient de révéler pour la première fois dans une étude qu’il existe un décalage complet entre la taille des ménages et l’offre de logements ». Exemple encore d’Altarea, numéro deux français, via sa filiale Cogedim, qui a lancé l’an dernier l’offre « Access » avec le Crédit Agricole sur près de 1 500 logements. A la clé, des prêts à taux bonifié (1,5 à 2 %) et sans intérêts intercalaires jusqu’à la livraison, une dispense de dépôt de garantie et des frais de notaire pris en charge par le promoteur.

D’autres promoteurs comme le Groupe Gambetta (120 salariés), qui produit 600 logements par an répartis à 50/50 entre secteur social et privé, ont pris la responsabilité de réduire leurs charges. « Nous nous sommes séparés d’une trentaine de collaborateurs en 2024 et avons décidé de limiter à chaque nouveau projet les premières dépenses estimées aux alentours de 150 000 euros, qui concernent à la fois les frais de conception, commercialisation et marketing » confie son président, Norbert Fanchon. Autre décision stratégique actée cette année par Gambetta : la cession au bailleur social Mancelle d’Habitation de 2 400 logements locatifs sociaux situés dans le Maine-et-Loire, la Loire-Atlantique et la Vendée.

En cédant son patrimoine social, Gambetta se dote ainsi d’une nouvelle capacité d’investissement de 100 millions d’euros avec un unique objectif : se concentrer sur l’accession à la propriété et lancer la production de 3 000 logements dans les prochaines années…

De son côté, Luc Bouvet, directeur général d’Eiffage Immobilier, dont le chiffre d’affaires est ressorti en légère amélioration en 2024 (716 millions d’euros), n’en démord pas : « la crise est tellement de confiance que nous devons nous pencher vers les solutions hors-sites, la transformation, les bâtiments évolutifs ». Il poursuit : « nous travaillons sur de l’habitat flexible et évolutif, basé sur des solutions de logement hors-sites qui peuvent être temporaires ».

A l’inverse de certains de ses concurrents, le Groupe Constructa, à la fois investisseur et promoteur immobilier, reconnaît en toute humilité avoir toujours enregistré des résultats positifs en connaissant même une année record en 2023. Il est vrai, depuis le début des années 2000, Constructa a toujours regardé en dehors des territoires trop concurrencés comme la première couronne parisienne, avec un déploiement en régions. « C’est ainsi que nous avons pu réaliser des opérations de grande envergure telles que la régénération de La Seyne-sur-Mer, Aix-les-Bains, Montélimar et, aujourd’hui, Huningue et Dunkerque » souligne Jean-Baptiste Pietri, président du Groupe Constructa. Alors, pour quand une sortie de crise ? Peu de professionnels osent en parler. « Au vu des échéances électorales et d’un temps de redémarrage de l’immobilier toujours long, il est, pour l’instant, difficile d’entrevoir une sortie de crise avant 2028 » affirme Jean-Baptiste Pietri. Le président d’Altarea Alain Taravella aime, de son côté, répéter régulièrement à ses équipes : « aide-toi, le ciel ne t’aidera pas », en leur rappelant qu’il faut attendre peu, à court terme, de la politique pour résoudre la crise du logement. A bon entendeur…

Sébastien Chabas

Logement, bureaux… idées et témoignages pour sortir de la crise et transformer la ville (1/2)